De l'art et de la peinture en général

Publié le par debailly

  Définition du mot peinture

 

Définition de Malévitch
La définition de Malévitch résume la peinture à un certain nombre de surfaces colorées savamment agencées sur la toile. La haute spiritualité du grand peintre permet d'envisager l'hypothèse d'un "coup de pied en touche" typique des rugbymen et des hommes d'esprit.

Contre définitions de "peinture"
Définir, c'est exclure. Une chose est définitivement sûre de ce qu'elle n'est pas. La peinture n'est pas Cinéma. Pas d'avantage Littérature. Encore moins Musique.

Par contre: est-on sûr qu'elle ne soit pas sculpture ? Il faudrait qu'elle soit lisse, enfermée dans une surface régulière plane et pleine... La moindre aspérité ou le moindre trou créerait la confusion... Cette frontière est trop floue pour être décidée sans arbitraire.

De la même façon, l'opposition entre "peinture" et "dessin" est un préjugé d'ordre historique. Si le peintre utilise un crayon gras - comme c'est la mode, ou si le dessinateur aquarelle son dessin, une certaine jurisprudence se met immédiatement en place, qui épaissit le texte de la loi jusqu'à rendre son esprit opaque...

Essayons alors de procéder avec ordre et méthode : retirons le dessin de la peinture. Que reste-t-il ? Une suite de matières plus ou moins colorées qui attendent sagement que la toile les invite...

Non seulement on ne sait pas ce qu'est la peinture, mais on n'en sait pas d'avantage sur ce qu'elle sera dans un siècle. On est définitivement sûr que de ce qu'elle a été : ce que l'histoire a retenu comme une de ses parties constituantes.

La peinture et l'histoire


Résumons ce constat par une petite boutade. La définition du dessin va sans dire : elle est ancestrale, préhistorique; elle ne présume rien. La définition de la peinture est plus capricieuse puisqu'elle est historique : elle suppose l'intérêt, l'anoblissement de l'objet par la reconnaissance de l'histoire.

Faire de la peinture, la défendre, c'est implicitement proposer une vision de l'histoire. Pendant que dessiner, c'est avant tout aimer la pratique d'un métier. J'essaie, depuis près d'un quart de siècle, de vivre ces deux définitions. Je ne compte pas pour autant me dérober à l'objectif de ce texte; ce paradoxe ne me suffit pas plus qu'à vous.

 L'art moderne


Pour s'exprimer, l'art moderne a réclamé d'autres moyens que ceux de l'habitude et des conventions. Il a choqué, certes, par nécessité plus que par vocation. La vérité est forcément brutale à l'aube de la grande guerre. Or, premier point, l'histoire a considérablement exagéré cet effet, jusqu'à contredire la motivation des artistes : ils servaient la vérité sans autre préoccupation que l'expression. Le fait de choquer était plus source de gêne que de profit à l'époque. Depuis, certains ont fait de cette caractéristique un métier... Pas les peintres modernes.

Les dérives de l'histoire - la leçon de l'art moderne


Autre dérive de l'histoire: la couleur est devenu symbole de liberté face au dessin réduit à une portion congrue. Or c'est particulièrement injuste. Pour exemple: Gauguin et Van Gogh étaient de redoutables dessinateurs. Pas un seul de leur tableau ne contredit cette évidence. La cerne y est toujours vivante et la touche puissante au point de sculpter la couleur, comme emportée dans un tourbillon d'énergie. L'oeuvre de ces grands artistes ne donne aucune légitimité à ceux qui ignorent l'importance du dessin; tout au contraire! L'un comme l'autre ne cessent de rappeler l'importance de sa pratique au cours de leurs nombreux courriers. Quant à la question de la couleur, elle est posée par les deux artistes en terme de liberté pour servir la vérité et la lumière, en aucun cas pour nourrir quelque phantasme libertaire de mauvais goût.

La leçon de l'art moderne procède du bon sens et de la plus haute sagesse. Une ambition noble dont le principal excès était de vivre à une trop belle époque, incapable d'accéder directement à la vérité - la guerre en sera la preuve. Puis le siècle a passé sur cette leçon pour en retenir une sorte de caricature. Comprenons-nous aujourd'hui l'art moderne, mieux que les contemporains de Gauguin et Van Gogh ? Au-delà du choc et de la surprise, avons-nous une autre perception du monde ?

 Que veut dire 'peinture contemporaine ?
L'usage contredit l'étymologie. En effet, tout peintre vivant est censé être contemporain. Or cette expression concerne la production des artistes contemporains qui s'affranchissent des habitudes du passé. L'artiste qui ouvre de nouveaux espaces à la création fait de la peinture contemporaine. Celui qui peint des paysages au goût des jours passés peut s'en réclamer: le public qui utilise ce terme le lui refusera, parfois même avec un certain énervement.

La peinture contemporaine est une des composantes de l'art contemporain, au même titre que la toute jeune vidéo. L'art actuel est controversé justement quand il ne reconnaît plus la peinture comme un art à part entière, quand il voit dans la peinture un art du passé. Et depuis quand les arts meurent-ils ? Les artistes meurent, les critiques, les historiens, mais l'art : jamais. Pourtant, la question de cette mort a été posée par nombre de personnalités autorisées tout au long du 20ème siècle. Une partie de ces gens sont eux-même déjà morts, et déjà ... Oubliés.

Peinture contemporaine : à quoi ressemble-t-elle aujourd'hui


Chaque jour l'artiste contemporain gagne son présent. Le passé qui l'a nourri ne peut suffire : il se doit de conquérir l'instant qui passe. Si la chance lui fait cortège, son travail d'artiste sera vision d'un possible devenir. Il n'a pour véritable outil que sa foi dans l'art et l'amour de son métier. Les concepts les plus sophistiqués ne sont que des béquilles qu'il lui faudra lâcher à chaque oeuvre. Les habitudes, rituels dérisoires, lui feront dans le meilleur des cas gagner un peu de temps, peut-être même un peu d'argent...

À quoi ressemblera-t-elle demain


«Demain est beaucoup trop loin. Parlons de ce soir, ma toile sera peut-être finie». Le style de l'artiste contemporain est évolution, attente, remise en question. Changement de formes, de formats, d'approche ou de sujet... Tentatives de rencontre au présent, pour le dire autrement, sans fantasmer. La réalité du trait, de la couleur et de la matière doivent permettre à la lumière de vivre dans l'oeil de l'autre : celui qui regarde.

Depuis plus d'un siècle, la transgression est devenue le principe même de l'art. Manet, avec le Déjeuner sur l'herbe, a rompu avec la tradition académique et choqué ses contemporains en présentant un nu dans une scène de genre (extérieur, déjeuner, hommes habillés...). Puis ont été remis en cause la technique picturale (Impressionnistes), le réalisme figuratif (Cubistes), la figuration (Abstraction)... et pour finir la peinture elle-même!
Casimir Malevitch (Carré noir, 1913 et Carré blanc sur fond blanc, 1918) et Marcel Duchamp avec ses "ready mades"
(urinoir, porte-bouteille, roue de bicyclette,...) sont allés au bout de cette logique.
L'objet devient oeuvre d'art par la volonté de l'artiste..
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